Passionnément fascinée par la tradition et les conventions picturales, les sphères d'influence artistiques de Sally Ross vont de la peinture primitive Flamande à Francis Picabia, en passant par la peinture médiévale. Mais le cœur de son inspiration réside dans les images anciennes glanées par l'artiste, souvent dans des publications éducatives ou des archives photographiques.
Les peintures de Sally Ross dépassent leur point de départ presque nostalgique pour produire une intersection inhabituelle entre la peinture illustrative ou traditionnelle et les photographies informationnelles d'un quotidien suranné.
Dans cette nouvelle exposition, Sally Ross développe sa pratique de transformation des visuels existants — issus de livres d'occasion et de photographies collectées — et son engouement singulier pour le portrait et le paysage. Ses peintures se délectent entre les oppositions aléatoires du représentatif/abstrait, objectif/subjectif,
masculin/féminin ou passé/présent. Ses paysages fertiles et idéalisés ou encore ses portraits colorés de tons pastel sont perturbés par des plans abstraits sinueux ou par la présence étrangement artificielle de grandes chevelures.
Les nouveaux portraits de Sally Ross ne ressemblent pas à des selfies d'aujourd'hui, ils n'interpellent pas, ils ne sont pas attentifs, disponibles, ni outrageusement séduisants. Ils continuent à éviter le contact visuel direct avec le spectateur, ils ne vous perçoivent pas et ne vous regardent pas. Ils gardent volontairement une distance et une froideur amplifiée par la palette peu naturelle qu'elle emploie.
Ici, Sally Ross explore une question récurrente en peinture: comment un homme ou une femme sont-ils supposés paraître ou être représentés? Certains de ses portraits ont été réalisés à partir d'un livre documentant la vie des stars transformistes et des artistes de cabaret des années 1960-1970 dans diverses scènes de travestissement. Ses interprètes androgynes évoquent Barbette, ce personnage célèbre de la scène burlesque parisienne des années 1920, dont Jean Cocteau et Man Ray parlaient en 1926: «En effet, il rassemble ceux qui voient la femme en lui, et ceux qui perçoivent l'homme en lui, ainsi que ceux dont les âmes sont touchées par le genre surnaturel de la beauté..» (Jean Cocteau, 1926, Barbette, Jean Cocteau/Man Ray, édition de 1988, borderline/Verlag, Bonn Allemagne, 1988, traduit de l'anglais).
La proximité des paysages et des portraits de l'exposition laisse nos imaginations et nos perceptions fabriquer ou déformer à l'infini n'importe quelle intention tirée des peintures. A partir de l'idée simple de transformer l'image collectée en image peinte, Sally Ross poursuit son obsession répétitive du paysage et du portrait et explore les variations subtiles d'interprétation d'une image, englobant à la fois imagination, folie, absurdité et leur rapport au réel. Elle cherche à traduire le désir de chacun pour les personnes ou les paysages qu'on ne connaît pas et qui n'existent peut-être pas ou qui n'existent plus.
Sally Ross est née en 1969. Elle vit et travaille à Melbourne en Australie. Auparavant, elle a été basée en France.
Sally Ross
26 mars-16 mai 2015
Paris 3e. Galerie Sultana
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